Papoter maquillage sans évoquer Lady GaGa, l’artiste aux deux visages ? Quel mauvais goût. La célèbre chanteuse pop joue, en effet, de ses pinceaux pour révéler à ses fans l’extravagante performeuse plastique qui cache une artiste solide et sans fard.

C’est une jeune fille de bonne famille, camarade de lycée de Paris Hilton, qui est derrière le phénomène pop Lady GaGa. Née en 1986 à New York, Stefani Joanne Angelina Germanotta a toujours voulu être une immense star et elle a tout fait pour le devenir. Très tôt marquée par des icônes comme Grace Jones, Freddie Mercury ou… David Bowie, la future « Mother Monster » se forme à Broadway mais sans faire de vague. Elle se produit dans des clubs new yorkais où elle prépare son entrée dans le monde des grands. Un soir, pour se faire remarquer, elle devient Lady GaGa en direct. Personnage pop, chic et choc qui n’a pas froid aux yeux, inspiré du célèbre « Radio Gaga » de Queen (1984), la Lady fait le show jusqu’à effacer complétement Stefani. La chanteuse, que tout le monde considère comme une produit bien fabriqué et bientôt oublié, met le paquet en première partie des stars de l’époque : Pussycat Dolls, Akon, Britney Spears… Avec sa perruque blonde, son look et son maquillage provoquants, toujours très calculés, Lady GaGa s’impose. Elle rassemble une communauté de jeunes fans, ses « Little Monsters » (les petits monstres) qui voient en elle une incarnation de l’étrangeté assumée. Son secret de longévité ? GaGa est avant tout une pianiste accomplie et une autrice talentueuse. Elle maitrise son sujet de la technique à la mise en scène en passant par son physique pour créer une performance totale dans le plus pur style pop. Dix ans après ses débuts et après six albums, Lady GaGa continue de surprendre, mais cette fois sans artifice, à nu et devant la caméra dans A Star Is Born (2018). Stefani Germanotta y accepte de se dévoiler. Un nouveau départ peut-être ?

Un monde sépare la manière de cultiver sa gloire entre le début du XXIème siècle et la fin des années 2010. Alors que la star se construisait sur une image de divinité intouchable, impeccablement habillée et maquillée, éloignée du commun des mortels grâce à la complicité des magazines people et de leurs paparazzis, l’arrivée des réseaux sociaux a provoqué une révolution. Facebook est lancé en 2004, Twitter deux ans plus tard et Instagram en 2010. Désormais, la célébrité peut toucher n’importe qui pourvu qu’il ou elle ait un nombre conséquent de followers, une communauté de fans solide, fidèle et imposante. Si les followers suivent, ils sont pourtant capricieux et ont besoin de s’identifier à la star. Fini le temps de cette distance sur papier glacé entre les stars et leur public, celui-ci exige de l’authenticité, de l’humain, de la proximité, sans filtre. C’est ainsi que la tendance « no filter » est érigée comme norme : les célébrités se montrent sans maquillage, au naturel, partagent des bouts d’intimité avec plus ou moins d’honnêteté. Car si on n’a plus besoin de s’arranger avec les photographes et les journalistes, il est possible de mettre en scène sa spontanéité à coup de selfies travaillés et rémunérateurs. Si la recette change, la gloire reste un jeu risqué où l’on joue toujours sa vie privée.

Titre extrait du premier album de Lady Gaga, The Fame, « Paparazzi » est un morceau alliant une pop très produite et un tempo dance soutenu qui retentira dans tous les clubs des années 2008 et 2009. Moquée avant la sortie de cet album, considérée comme un feu de paille qui sera vite éteint, l’artiste surprend tout le monde avec The Fame qui l’installe comme la digne descendante de Madonna. Elle y chante le désir de gloire et d’amour, si fort chez elle depuis tant d’années, et « Paparazzi » en est un des morceaux emblématiques. Fun, grandiose dans ses chœurs, porté par les modulations de voix d’une GaGa qui maîtrise tout de A à Z, « Paparazzi » convoque la figure du fan excessif, de la groupie possessive à l’extrême qui cherche à se faire aimer de l’objet de tout ses désirs… mais à quel prix ? Le vidéo clip raconte une autre histoire, celle d’une Lady Gaga superstar objet de fantasmes et de convoitises, icône dans un décor ultra léché, cinématographique au bling-bling outrancier. Ici la chanteuse joue de kitsch et dévoile un second degré inattendu avec son look impossible, ses mouvements de danse rigides et robotiques. Lady Gaga, star en plastique inaccessible ? Marionnette assoiffée d’amour ? « Paparazzi », objet pop, installe le phénomène total GaGa pour la prochaine décennie.