Plus qu’un effet de mode, c’est aujourd’hui une scène identifiable et remarquable, dont l’originalité a su convaincre. Nos voisins francophones s’imposent aujourd’hui sans peine. Voici un petit aperçu des pépites à suivre.

Est-il vraiment nécessaire de le présenter ? William Kalubi de son vrai nom est né à Kinshasa en 1992. Il est repéré par Booba en 2015 puis propulsé sur le devant de la scène avec son deuxième album, Ipséité. En plein raz-de-marée belge, ce narrateur lucide nous transporte autant grâce à ses paroles crues qu’à son doux flow. Des sonorités africaines accompagnent son récit d’une enfance passée dans l’horreur de la guerre zaïroise. Il marie aussi textes soutenus et instrumentales électro. Les punchlines de cet écorché vif sont célèbres pour leur violence si typique du rap hardcore. Mais au milieu de ces vulgarités se cachent de véritables prouesses poétiques.

Le Bruxellois né en 1994 a su s’imposer rapidement. Après avoir signé chez Warner Music et monté son propre label, c’est en 2017 que le prodige se révèle enfin. Dans « 1994 » le rappeur apparaît plus mature, avec une voix (un peu) moins autotunée et des instru toujours inspirées du raï ou de la dancehall. Hamza est aussi un producteur de talent, travaillant avec attention sur toutes ses instrumentales. C’est pourquoi l’ensemble de son œuvre est d’une telle cohérence artistique.

Après un EP resté plutôt discret, c’est en 2018 que Moka Boka nous illumine enfin. Avec « Pas de pluie pas de fleurs », un premier album aux instru légères et efficaces. Il maîtrise avec brio l’équilibre entre le chant et le rap et pour composer il s’inspire de grands noms du hip-hop américain tels que 50 Cent ou Kanye West. Fils d’une Belge et d’un Congolais, le métissage et l’identité sont au cœur de ses chansons. Mais il nous invite aussi dans la mélancolie de ses amours passés. On a pu l’apercevoir aux côtés de Lomepal, Swing ou encore Roméo Elvis mais les projets en solo du jeune poète se démarquent de cette scène belge par leur singularité. En 2020 il partage deux dates avec Oxmo Puccino, rien que ça ! La « relève du rap belge » sera assurément présente dans toutes les playlists d’ici peu …

En 2012, Primero, Loxley et Swing décident de rejoindre la fameuse assemblée du rap belge. Car oui, quand on parle de rap francophone impossible de ne pas penser à nos voisins désormais. Leur premier album, « Zeppelin », sort en 2017. Le succès est instantané et fulgurant. À l’heure de l’autotune et de la trap, leur rap « à l’ancienne » met un point d’honneur à délivrer un message d’humanité. Le trio est également connu pour avoir été le premier compagnon d’armes de Roméo Elvis qui apparaît dans leur clip aux 6 millions de vues, « Apollo ». D’abord sur la scène Zebrock de la Fête de l’Humanité 2018, puis sur la Grande Scène en 2019, on a pu profiter de l’énergie terriblement communicative du trio.

La musique de Marie-Pierra est un mélange savoureux : poésie, urbain, Rwanda et Japon. Après plusieurs EPs sous le nom de « Lous », la rappeuse décide de mettre en avant tous ceux qui l’entourent et travaillent dans l’ombre : « the Yakuza ». On découvre par exemple qu’à la production c’est El Guincho, dans l’ombre de Rosalìa également, qui sublime la plume belge. « Dilemme », son premier morceau devenu viral est à l’image de l’univers de la chanteuse. Rythmiques trap, piano et flow maitrisé sont mis en scène dans des clips à l’esthétique chiadée. Et c’est là que Lous nous rappelle qu’elle a tout pour être aussi une icône pop. Pour 2020, la jeune belge nous promet un album autobiographique, « Gore » dont l’intimité mettra en lumière des causes qui lui sont chères.

Souffrance est un rappeur montreuillois, membre du collectif l’uZine, aux côtés de Cenza, Tonio le Vekoso et TonyToxik, au rap teinté de boom-bap. Son blaze évoque la France d’en dessous, la « Sous France », une souffrance commune. Il a écrit et posé son premier texte dans les studios du Café La Pêche à Montreuil dans les années 2000, comme de nombreux rappeurs de cette décennie. Il sort un premier EP, Le peuple a faim, en 2015.

Après de multiples projets et un parcours chaotique, il publie son premier album, Tranche de vie, en 2021. Il revient sur ses années de jeune adulte, de ses 18 à 30 ans. Son rap se veut également introspectif. Dans Tour de magie, sorti l’année suivante, il semble se retourner sur le chemin parcouru à 36 ans et fixe son regard sur celui qui lui reste à faire.

Souffrance puise ses références dans le rap des années 1990-2000 avec le scratch, base du rap, des morceaux longs sans refrain, des artistes comme La Mafia K’1 Fry, Lunatic, Tandem ou encore Ärsenik… L’artiste nous propose un rap aux codes très marqués tout en apportant une touche d’originalité et de modernité avec notamment d’avantages d’instrus dans son dernier album.