Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, de l’autre côté de l’Atlantique un nouveau genre musical voit le jour. Si une partie de la jeunesse française cultivait sa révolte dans les fêtes clandestines, la jeunesse américaine n’est pas en reste. Après la désillusion causée par les massacres de masse et les bombes atomiques et contre l’uniformisation insufflée par une société d’abondance : un vent de rébellion anime les foules. Plus question de faire la guerre mais plutôt de vivre vite et à fond : le rock’n’roll est né.
Petit frère agité du rhythm’n’blues commercial des années 40, le rock’n’roll est plus rapide, il met à l’honneur la guitare, les instruments à cordes pincées (mandoline, banjo, contrebasse) ou l’harmonica. Mais surtout, le rock’n’roll se danse. Comme son nom l’indique, les corps s’enroulent et de déroulent au rythme des titres d’Elvis Presley.

De petit prince à roi du rock’n’roll, Elvis Presley nait en 1935 à Tupelo près de Memphis. Destiné à être camionneur, il se rêve plutôt chanteur. Biberonné au blues, il enregistre en 1954 une reprise du morceau blues “That’s Alright, Mama !” en y ajoutant la guitare country et un tempo plus rapide. Elvis vient de créer le rock. Rien que ça ! La suite n’est que triomphe, il vend plus d’un milliard de disques, possède plus de 150 albums et singles “disque d’or”, “disque d’argent” ou “disque de platine”. Acteur, il tient le premier rôle dans pas moins de 31 films. Il disparait en 1977 chez lui, non loin de Memphis, d’un arrêt cardiaque provoqué par un cocktail d’antidépresseurs. Mais même dans la mort, Elvis détient tous les records : chaque année 600 000 personnes se rendent en pèlerinage jusqu’à sa maison de Memphis, classée monument historique en 2006.

Composée en 1957 pour la bande-originale du film éponyme, “Jailhouse rock” (en français, “le rock du bagne”), cette chanson est 67ème dans le célèbre classement du magazine Rolling Stones : les 500 meilleures chansons de tous les temps. Avec son refrain entrainant “Let’s rock / Everybody, let’s rock / Everybody in the whole cell block / Was dancin’ to the Jailhouse Rock”, “Jailhouse Rock” étonne. Les paroles sont en décalage avec l’interprétation qu’en fait Elvis. Si la chanson décrit la vie au bagne de manière assez légère, se permettant des blagues sur l’homo-érotisme de la vie en prison, Elvis lui chante cette “Jailhouse rock” avec tout le sérieux que le genre le demande.
C’est la vidéo associée au morceau, qui termine de faire la réputation de “Jailhouse Rock”. La chorégraphie, imaginée par le jeune Elvis de 22 ans, est rapide et insolente. Les jambes et les bassins se balancent au rythme rapide de la guitare et de la basse.

Danse fougueuse et entrainante, le rock’n’roll ne met pas longtemps avant de traverser l’Atlantique et d’agiter les corps des jeunes Européens. L’amplitude et la fluidité des mouvements, créant une confusion dans les manières codées et genrées d’envisager la danse de couple séduit. Plus que jamais, le bal au son du rock devient l’endroit de rencontre privilégiée des jeunes. De plus, l’esthétique rockabilly se popularise et devient une vraie sous-catégorie de bal populaire. Ce style rebelle et, en même temps, adoré des films hollywoodien fait rêver les adolescents et jeunes adultes européens, se rêvant eux aussi bandit et adulé de tous.

Plusieurs danses sont constitutives de l’imaginaire du bal rock. Elles puisent leurs racines dans la culture afro-américaine, à l’instar du rock’n’roll. On pense au jive, au lindy hop ou encore au boogie woogie. Toutes ces danses viennent du swing et sont nées dans les années 30, suivant le phénomène jazz aux États-Unis. Elles ont connu une deuxième jeunesse avec l’apparition du rock’n’roll qui les a transformés en danse à 6 temps, puis à 8. Cette évolution rend les danses plus rapides. De plus en passant d’un rythme ternaire à binaire, le swing disparait peu à peu pour rendre les danses toujours plus électriques, voire dans le cas du Rockabilly Jive : acrobatiques. Petite particularité de ce dernier, il n’y a pas de rôle masculin/féminin (leader/suiveur) mais chacun des partenaires de cette danse de couple danse ses propres mouvements. Un vent de nouveauté souffle sur le bal !