Une nouvelle révolution va la régler définitivement : le compact disc. Le hollandais Philips, encore lui, associé au japonais Sony met au point un support numérique garantissant inaltérabilité et reproduction sonore parfaite. Le compact disc est la folie sonore des années 80, enterrant le vinyle comme la cassette… pour un certain temps. Ses petites alvéoles lues par un rayon laser constituent une grande avancée technologique et sont sans doute à la source d’une pollution majeure : combien de ces lecteurs sont aujourd’hui empilés dans des décharges, sans vraie solution de recyclage ?

C’est le smartphone connecté aux plateformes de téléchargement légales : des millions de titres sont à portée de Web. Grâce à nos appareils nous avons accès à des bibliothèques musicales, son et image, quasiment illimitées et en temps réel. Ironie de l’époque : longtemps affirmés comme le marqueur d’une identité singulière, indépendante et revêche nous permettant d’échapper au système, nos goûts musicaux sont aujourd’hui repérés, analysés et restitués dans les méandres du marketing dont les fameux GAFAM sont les maître incontestables. Et le système sait - presque - tout de nous.

Nous sommes minutieusement enregistrés, à notre tour.

Le streaming musical est une pratique d’écoute issue de la révolution internet. Plutôt que de posséder matériellement la musique grâce à l’achat des lecteurs MP3, mais avant cela de CDs, de vinyles, de cassettes voire même de partitions, l’auditeur peut écouter en flux continue n’importe quelle musique disponible en ligne. Cette pratique a profondément transformé l’industrie de la musique, modifiant non seulement la manière dont l’auditeur consomme la musique, mais aussi comment elle est produite, distribuée et rémunérée.

Le streaming émerge progressivement grâce aux avancées technologiques des années 1990. Le format MP3, alors inventé, s’inscrit dans la possibilité de partager numériquement des fichiers audios. C’est ainsi que Napster, plateforme très vite déclarée illégale, permet aux auditeurs du monde entier de posséder numériquement des musiques sur leur stations d’écoutes numériques. Critiqué par les industriels de la musique, ce partage massif permet une démocratisation à l’accès à la musique. Conscient du changement radical dans les pratiques d’écoutes, et aux risques de l’effondrement économique du secteur à cause du piratage musical, les industriels ont trouvé la solution dans le streaming musical.

Au début des années 2010, arrivent les plateformes de streaming comme Spotify ou encore Deezer. Ces propositions innovantes permettent aux utilisateurs d’accéder légalement à de la musique pour un moindre coût, de créer des playlists et leurs bibliothèques musicales ultra-personnalisée. L’industrie musicale trouve ainsi une nouvelle voie pour monétiser la musique. Le principe de l’abonnement mensuel offre aux auditeurs un accès illimité à des millions de titres transformant ainsi la consommation musicale en un service continu cultiver par les algorithmes qui savent tout des goûts des abonnés plutôt qu’en une série d’achats ponctuels.

Cependant, le streaming musical reçoit beaucoup de critiques de la part des artistes : rémunération faible, difficulté d’émerger face à la concurrence démultipliée, impérialisme sur la durée des artistes les plus écoutés, concentration sur les hooks accrocheurs optimisés pour l’économie du streaming. La critique vient aussi des habitudes d’écoutes liées au streaming : consommation compulsive, perte du lien physique à la musique, écoute désintéressée de la musique de fond, perte de la formation d’une culture personnelle. Ainsi, en 2023, une étude à l’université de Bar-Ilan en Israël montre que les auditeurs ont moins de plaisir à l’écoute lorsqu’ils utilisent le streaming musical.

Profondément installé dans notre quotidien, le streaming constitue un des enjeux principaux du milieu musical d’aujourd’hui.