Paopga

Morceau

1988

"Paopga": le chant de la grève

Chant de lutte des travailleurs sud-coréens, « Paopga » est indissociable de l’histoire du combat pour la démocratie d’un pays qui connut durant de longues années une dictature militaire brutale et corrompue. La chanson, dont le titre signifie littéralement « le chant de la grève », est composée en 1988 par Kim Ho-chol, quelques mois après les grands soulèvements démocratiques de juin 1987 qui précipiteront la fin du régime militaire sanglant de Chun Doo-hwan.
Mais revenons un peu en arrière…
Depuis le début des années 60, le président élu après un coup d’état, le général Park Cheung Hee, exerce un pouvoir brutal, furieusement anticommuniste et militariste, lié aux Etats-Unis, dont l’armée occupe de très nombreuses bases militaires dans le pays. L’essor économique rapide du pays se paie au prix fort pour le monde ouvrier, sommé de travailler et de se taire. Les syndicats sont sous contrôle et tout signe libéralisation, tel la mini-jupe ou les cheveux longs, sont bannis. En 1970, le jeune Jeon Tae-il, ouvrier du textile s’immole, protestant contre les conditions alors faites au peuple de Corée du Sud. La mémoire de ce sacrifice reste vive et devient le fil conducteur des protestations ouvrières, fréquentes et toujours brutalement réprimées, dans un pays situé aux avant-postes de la guerre froide. Le 26 octobre 1979, Park est assassiné par son ami le chef de la KCIA, les services secrets. Moins de deux mois plus tard, l’espoir est balayé. Une junte militaire conduite par Chun Doo-hwan prend le pouvoir et applique une loi martiale de fer. Le 17 mai 1980, des centaines de milliers de personnes manifestent pour le retour à la démocratie dans les rues de la ville de Gwangju située au sud-ouest du pays. Le mouvement fut férocement réprimé par l’armée. Le nombre des morts et de disparus, imprécis, se compte par centaines. Chun Doo-hwan gagna le surnom du « Boucher de Gwangju » et l’épisode marqua profondément la population. À l’époque, la chanson « Qui a tué Grand-Maman ? » du chanteur français Michel Polnareff, pourtant parue en 1970, est très populaire en Corée du Sud. DDes manifestants semblent en garder le timbre, mais changèrent les paroles après le massacre pour en faire « La chanson de mai ».
Huit ans plus tard, en 1987, elle accompagne la révolte démocratique, mais se voit « concurrencée » par une autre chanson, plus traditionnelle dans sa forme, mais moins elliptique dans son propos ; une marche scandée, portée par un rythme qui en renforce le caractère combatif : « Paopga ». Les paroles de « Paopga » ont un écho particulier avec la lutte pour la démocratie en Corée du Sud, indissociable du combat des travailleurs pour leurs droits.

Par Gaëlle Maisonnier. Crédits photo vignette : Image de film « 1987, When the day comes » de Jang Joon-Hwan, 2017

Playlist

« Paopga » de Kim Ho-chol, 1988

1:09

« La chanson de mai » inspirée de « Qui a tué Grand-Maman » de Michel Polnareff, 1980

1:51

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