La Paix, maintenant !

Parcours
Publié le 6 septembre 2022

III.
Black power, peace and soul

"War" par Edwin Starr, 1970

Qui est Edwin Starr ?

Edwin Starr (né en 1942 à Nashville, USA – mort en 2003 à Bramcote, Grande-Bretagne) est un magnifique chanteur de soul afro-américain, doté d’une voix puissante au timbre rugueux à souhait. Grandi dans le Sud dans États-Unis, il monte vers l’Iron Belt, la ceinture des États industriels du nord des Etats-Unis, dans l’Ohio puis s’installe à Detroit, dans le Michigan. Tenté par la musique, il chante dans une formation de doo-wop, lieu de passage quasi-obligatoire à l’époque. Puis il enregistre ici et là avant d’être repéré par le fameux label Tamla Motown. Il enregistre cette chanson dont il fera le hit parfait, juste après The Temptations, grandissime groupe maison. Il publiera d’autres disques habités de sa voix explosive et d’un sens exceptionnel du placement et du rythme, mais aucun n’atteindra le succès de “War”.

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Edwin Starr (image Universal)

A propos de "War"

Le roulement de tambour nous a à peine accrochés que “War” jaillit comme un cri entouré de breaks instrumentaux puissants qui dévoilent la logique du morceau. Déclamatoire et dansant, il se partage entre le chanteur et le chœur : le “War is good for…” du chœur et le “absolutely” de Starr se prolongent dans un “nothing” plein de répulsion. La guerre est absolument bonne à rien. Le texte, écrit par deux des paroliers essentiels de la soul music, Barrett Strong et Norman J. Whitfield, dresse avec beaucoup de conviction la liste des méfaits de la guerre, stigmatise “cette amie du croque-mort”, plaide non sans invoquer Dieu (nous sommes aux Etats-Unis) pour une vie simple faite d’amour et de compréhension. “War” s’achève sur une exhortation à le dire haut et fort : la guerre ne sert à rien. Le climat politique de l’époque fait vite de “War” un hymne, d’abord dans la communauté noire, meurtrie par la répression violente des émeutes à Los Angeles ou Detroit et dont les enfants remplissent les cercueils de retour du Viêt-Nam.

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La pochette du 45t paru en 1970 (image Tamla Motown)

Ce que nous dit "War" de son époque

Il faut bien sûr entendre cette chanson à la lumière de la situation aux Etats-Unis. Foncièrement antimilitariste et hostile à la guerre du Viêt-Nam, elle offre un second registre de compréhension. Les émeutes de Watts en 1966, celles de Detroit en 67 puis Chicago en 68 ont enflammé la communauté afro-américaine. La répression extrêmement brutale, sur fond d’une grande misère sociale, accompagnée des assassinats de Malcom X puis du révérend Martin Luther King en 68, auquel succède celui de Bobby Kennedy, frère du président John Kennedy assassiné en 1963, candidat aux élections présidentielles de 69, avec de sérieuses chances de l’emporter. Les militants des Black Panthers sont littéralement exterminés par le FBI, pendant que le Ku Klux Klan réveille ses troupes dans le Sud profond. Le climat est malsain aux Etats-Unis : les forces réactionnaires sont sur le qui-vive, bousculées par le mouvement contre la ségrégation, la libéralisation des mœurs, l’éclat de la révolution cubaine et l’échec de l’intervention au Viêt-Nam, le tout couronné par l’avance russe dans le domaine spatial.
Ce climat de violence dont les communautés afro-américaines sont les premières victimes est l’arrière fond qui donne tout son poids au cri pacifiste aux accents quasi insurrectionnels qu’est “War”. Vainqueur des élections de 1969, l’affreux président Richard Nixon partira par la petite porte des minables à la suite du scandale du Watergate. Mais le sale boulot aura été fait, au Viêt-Nam comme aux États-Unis.
Soulignons enfin, que Tamla Motown qui publie le titre s’était jusque là tenu soigneusement à l’écart de toute contestation de l’ordre établi, se rangeant du côté des thèses intégrationnistes et du business, sans vague. Changement de ton qui en annonce d’autres, peu après le label publiera les albums de Marvin Gaye et Stevie Wonder qui se veulent ouverts sur le monde.

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Rejet de la guerre et rejet de la ségrégation vont de pair (image Cineteca Madrid)

Paroles de "War"

Guerre, hein, ouais War, huh, yeah À quoi ça sert? What is it good for? Absolument rien, euh Absolutely nothing, uhh Guerre, hein, ouais War, huh, yeah À quoi ça sert? What is it

"War" par Edwin Starr, 1970

3:22

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