Le groupe NTM, formé à Saint-Denis en 1989 par Didier Morville (JoeyStarr) et Bruno Lopes (Kool Shen), est un des précurseurs du rap en France.
Leurs textes crus et universels font un constat terrible sur l’état des banlieues et dénoncent l’injustice sociale qui loge dans ces périphéries. Considérés maintenant comme des monuments du rap dans la langue de Molière, ils sont l’influence majeure de tous ceux qui ont suivi.
Dans ce duo à l’équilibre presque surnaturel, JoeyStarr a l’énergie incendiaire et Kool Shen la force tranquille. La fusion de ces deux MC aux paroles contestataires deviendra une vraie chambre d’écho pour les classes populaires.
L’histoire commence en juillet 1983, lorsque des danseurs hip-hop performent place du Trocadéro. Le jeune Kool Shen s’essaie au breakdance ; JoeyStarr choisit le smurf. Peu après leurs premiers pas (littéralement) dans la culture hip hop, ils se mettent au graffiti et font de la ligne 13 du métro parisien, leur plus grande toile.
Après la danse et le graffiti… c’est tout naturellement qu’ils se plongent dans le rap. Leur premier album, Le Monde de demain, sort en 1991 et se vend à plus de 50 000 exemplaires. La raison de ce succès ? Ni promotion exorbitante, ni couverture médiatique particulière, mais des textes crus qui résonnent avec un climat social sous tension. Ils produisent un grand choc.
Car voilà, les années 90 sont marquées par un discours médiatique stigmatisant à l’égard de la banlieue et de sa population, majoritairement précaire et issue de l’immigration. Sorti un an après les émeutes de Vaulx-en-Velin, l’album porte la voix d’une jeunesse qui en a marre de se sentir abandonnée par les pouvoirs publics. Les violences policières se multiplient en ce début de décennie.
NTM, le nom n’est pas choisi par hasard. Un brin gênée, leur maison de disque suggère de changer l’acronyme de Nique ta mère par le Nord Transmet le message. Ça vous amuse ? Nous aussi !
Malgré de nombreuses oppositions, le Suprême a su faire gage d’authenticité et imposer sa liberté tout au long de sa carrière.
« Le monde de demain, quoi qu’il advienne nous appartient » scandait Kool Shen en 1991. C’est bien vrai. Les deux parrains de la Seine-Saint-Denis font désormais partie intégrante du paysage musical français et l’histoire du groupe fait même l’objet de séries. Leurs textes n’ont pas pris une ride et résonnent encore aujourd’hui, alors que l’extrême droite, et sa politique toujours plus xénophobe et répressive, ne cesse de monter dans les sondages.
Suprême NTM
Pur produit de cette infamie Appelée la banlieue de Paris Depuis tout jeune je gravite avec le but unique D'imposer ma présence Trop paresseux pour travailler Trop fier pour faire la…
Ce ne sont pas les cités ou ses habitants qui ont inventé la Loi de la Jungle. Même si c’est là qu’elle sévit aussi, parfois. « Le rouage est bien huilé, Le système bien ancré »… Avec ce pamphlet, polémique et virulent, donc excessif et sans concession, Shen & Starr choisissent des mots qui font mal. Ça grince et ça fâche. Ils transmettent la même rage qu’avant eux Bob Dylan, Les Who, les Sex Pistols. Rap, rock, au-delà des étiquettes et des forces de frappe, une même intention, dénoncer les rouages de l’oppression.