Let a B!tch Know

Pour Kiddy Smile, l’identité est plurielle. Pour lui, c’est clair, il est fils d’immigrés, noir et gay, comme il l’affirmait sur le t-shirt qu’il portait en performant à l’Élysée. Le voguing, cette danse expressive et affirmée venue tout droit de New York, qui se danse souvent sur de la house, condense bien tout ce que Kiddy Smile est.

Pour lui, la musique est un moyen d’expression, une liberté infinie où être différent est un droit mais aussi un devoir. Dans « Let a B!tch Know », il produit ce que l’on n’a pas l’habitude d’entendre dans l’électro de club. Le morceau est plutôt sombre, dissonant et étrange par moments. Les paroles sont simples et sonnent comme une catharsis contre toutes ces personnes jalouses, envieuses, égocentriques et médisantes, qui ne le disent pas mais ne souhaitent que le malheur des autres. Tout le monde rencontre au moins une personne comme celle-ci, et « Let a B!tch Know » est la vengeance, l’exutoire.

Ainsi, ce son donne instinctivement envie de relever la tête et de se prendre pour le personnage principal de sa propre vie. Envie aussi de s’affirmer, de cultiver sa différence. C’est sans aucun doute cet empowerment que visait Kiddy Smile en produisant ce morceau. C’est d’ailleurs ce qui ressort très clairement du clip. La vidéo est tournée dans une cité d’Alfortville, en périphérie de Paris, entre barres d’immeubles et terrains vagues. Les codes du rap sont là : voiture qui brûle, postures de bonhommes, survèts Adidas, quads et gros cylindres… Pourtant, ceux qui se cachent sous leurs capuches et leurs casquettes à l’envers deviennent progressivement des queens, voguant en petite tenue et talons hauts. La cité, le parking souterrain, lieux potentiellement effrayants, deviennent des safe spaces d’expression de soi où deux hommes ne craignent pas de s’embrasser. Le DJ donne une grande importance à son univers visuel et ses clips sont souvent l’occasion pour lui de donner une autre dimension à ses morceaux, notamment sur « Be Honest », qui devient avec son clip un hymne à l’ouverture d’esprit des religions.

Avec « Let a B!tch Know » et la réalisation audiovisuelle qui l’accompagne, Kiddy Smile permet aux queers de reconquérir et de se réapproprier un territoire longtemps hostile à leur présence. En plus de produire un morceau original, minimaliste, empouvoirant, il accomplit un grand pas sur le chemin de la représentation queer.