Karaoke

Lorsqu’on dit karaoke, que vous vient-il à l’esprit ? Des vacances au camping ? Des soirées entre amis un peu trop endiablées ? De très beaux aigus sur un morceau de Céline Dion ? Tout ça à la fois ? Peut-être. Mais connaissez-vous les origines du karaoké ?

Etymologiquement, le mot vient du japonais « orchestre vide ». C’est imparable : nul besoin de musiciens live pour pouvoir chanter, une machine suffit. Une bande son, un écran il n’y a qu’à lire les paroles qui s’affichent en sous-titre en rythme aidée d’une bouncing ball*. Sur cette instrumentale dépourvue de chant, chacun est libre de montrer l’étendue de son talent vocal (ou pas…).

Les origines du karaoke restent un brin mystérieuses. À la fin des années 1950, Mitch Miller, fameux chanteur et animateur américain, présente « Sing Along With Mitch » une émission de télévision où le public est invité à chanter avec lui, en lisant les paroles sur un écran. L’idée est là mais c’est au Japon que la première machine à karaoke est inventée. Mais là encore, il y a embrouille. À ma droite, Kisaburō Takagi, disquaire japonais, qui flairant l’engouement pour les juke-boxes devant lesquels les jeunes s’époumonent aurait créé la première machine à karaoke en 1962. À ma gauche, Daisuke Inoue, batteur et pianiste, l’aurait inventée à karaoke en 1971 dans sa ville natale à Kobe. Ce dernier a même reçu le prix Ig Nobel de la paix, récompense parodiant le Nobel, en 2004 pour son « invention du karaoke, fournissant ainsi une nouvelle méthode pour que les gens apprennent à se tolérer ».

Mais que valent ces querelles fassent à l’immense popularité du karaoke, qui occupe une place de choix au panthéon de la pop culture. Au Japon, bien évidemment, mais aussi en Chine et en Corée du Sud où une immense partie de la population se laisse prendre au jeu, il existe des établissements dédiés au karaoke, depuis les années 1980. Les chanteurs en herbe peuvent y louer des salles privatives, manger, boire, se lâcher car le karaoke a une forte fonction sociale. Dans certains pays, on loue les machines pour des événements en famille, entre amis, entre collègues, des anniversaires, et même des mariages. En Chine, le karaoke est même une étape quasi rituelle lors de la signature d’un contrat entre hommes d’affaires ! Alors ringard, le karaoke ?

Si ce divertissement est extrêmement prisé en Asie depuis plusieurs décennies, en France il s’est largement popularisé dans les années 1990 grâce à des émissions télé. D’abord snobé, considéré comme un loisir un peu vulgaire qui se pratique dans des bars miteux où les clients chanter à tue-tête des chansons populaires, le karaoke est petit à petit largement adopté. L’arrivée en France dans les années 2010 des « karaoke box » japonaises, ces établissements dédiés au karaoke, le rend cool. Le karaoke est désormais décliné partout même dans des jeux vidéo comme SingStar. L’émission « N’oubliez pas les paroles » présentée par Nagui, surfe aussi sur la vague, et des milliers de chansons existent en format karaoke sur YouTube. Qui peut dire qu’il n’a pas déjà poussé la chansonnette au moins une fois devant un écran ?

La pratique du karaoke, en ce qu’elle unit et rassemble, ne fait que réaffirmer le rôle de la musique : la communion et le partage entre les êtres humains.

Par Aleksien Méry
Crédit photo vignette : © Adobe Stock, Alfa27

« Balle rebondissante » en anglais. Il s’agit d’un artifice visuel utilisé dans les enregistrements vidéo pour aider le public à chanter sur de la musique en direct ou préenregistrée. Les paroles apparaissent à l’écran. Une balle animée rebondit sur le haut des mots, au rythme de la chanson, sur chaque syllabe quand elle doit être chantée.