Morceau
Le 17 octobre 1961, les Algériens et les Algériennes de Paris et sa banlieue décident de manifester contre la réforme raciste du 5 octobre imposant un couvre-feu à chacune et à chacun entre 20 h 30 et 5 h 30. Cette nuit-là, une partie d'entre elles et eux sera jetée dans la Seine. Une autre sera enfermée et torturée au Palais des Sports pendant 3 jours et 3 nuits, le lendemain étant réservé à Ray Charles.Camélia Jordana, en introduction à " Dhaouw ", lors de la cérémonie des Victoires de la Musique, 2019
“ Dhaouw “, “ la lumière “ en arabe, est une évocation de la fameuse manifestation des Algériens de Paris achevée par un massacre commis par la police parisienne le 17 octobre 1961.
Ce morceau témoigne de l’importance prise par les questions sociales et politiques dans l’évolution de la carrière de Camélia Jordana. Extraite de l’album “ Lost “, elle se distingue également par une volonté de la chanteuse d’aller à la rencontre d’autres univers musicaux, mêlant ici électro et traditions maghrébines, à travers l’accompagnement à la derbouka et le refrain vocalisé en arabe.
Petite-fille d’un dirigeant du FLN dans la région de Toulon, Camélia Jordana a voulu ici mettre en lumière un événement longtemps occulté de l’histoire de France et honorer sa mémoire familiale.
Le premier couplet décrit métaphoriquement une immigration vécue comme forcée (les “ bijoux “ sont “ fermés, liés à mes pieds “ comme les fers des esclaves) et associent sang et eau pour évoquer le massacre de la manifestation d’octobre 1961. Mais résonnent aussi à travers ces images le parcours des esclaves du commerce triangulaire ou celui des hommes, femmes et enfants migrants d’aujourd’hui, noyés en Méditerranée ou ignorés des “ robots “ qui, en France, leur “ tournent le dos “.
Le refrain, quant à lui, semble faire entendre la voix intérieure de la chanteuse, la pressant de se saisir de cette histoire qui est aussi la sienne et de la responsabilité de ne pas oublier.
Elle use donc de sa voix et de cet héritage, entre français et arabe, pour faire advenir la lumière et contrer l’indifférence et le déni.
À mes poignets des bijoux À mes poignets des bijoux Fermés, liés à mes pieds Dans mes veines des bateaux Dans mes veines des bateaux Unis, il y faisait si beau Dans la Seine le poids des…
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