Morceau
Bouquet de couleurs, cette chanson s’adresse à un enfant, pour sécher ses larmes et l’endormir ; mais si les doux arpèges de guitare et la poésie des images évoquent une berceuse, ils ne parviennent pas à effacer une violence sous-jacente, celle d’un racisme meurtrier qui refuse de voir la beauté de l’histoire que Béart nous raconte. Si l’enfant doit cesser de pleurer, c’est parce que, trop petit et innocent, il ne “ sai(t) pas encore pourquoi” le monde mérite parfois ses larmes… et les nôtres.
Les couplets esquissent petit à petit une histoire d’amour, heureuse, lumineuse, colorée, faite de fruits, de fleurs, de mer et de soleil. Mais “ il était blanc elle était noire “ : la foule “ grise “, intolérante, les rejette et les menace. Sur leurs rires et leur bonheur plane l’ombre de la violence et de la mort, appelant les larmes du refrain.
La chanson joue donc des contrastes entre la beauté et la vie, qui sont du côté des jeunes amants, et la dangereuse médiocrité de cette foule raciste : c’est par un jeu subtil sur les émotions que Béart prend position. Elle évoque ainsi, et plus particulièrement dans le troisième couplet qui associe “ cerises “ et “ pendu “, le “ Strange Fruit “ chanté par Billie Holiday et Nina Simone. Ce morceau, enregistré en 1939, tire toute sa puissance d’une métaphore : derrière ces “ fruits étranges “ suspendus aux branches des arbres du Sud des États-Unis, ce sont les corps suppliciés des victimes afro-américaines du racisme qui se donnent à voir et nous bouleversent.
Poésie des images, contraste entre une apparente douceur et une violence suggérée, émotions suscitées : la tendre berceuse de Béart nous touche par les mêmes biais.
Dors mon enfant c'est déjà l'heure Ça ne sert à rien que tu pleures Dans tes yeux couleur d'arc-en-ciel Il y a des larmes de sel Couleurs vous êtes des larmes Couleurs vous êtes des…
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